Après plusieurs années de recherches sur la pollution plastique dans le milieu océanique, les recherches s’intéressent désormais au milieu continental et plus précisément aux sources de cette pollution. Les dernières études avancent que 80 % de la pollution océanique est d’origine terrestre et majoritairement transportée par les rivières (Schmidt et al., 2017). Quant à la pollution plastique des rivières, elle serait surtout alimentée par les réseaux pluviaux urbains (Tasseron et al., 2023). A travers l’utilisation de modèles, certains auteurs estiment que 2,75 * 106 t/an de plastiques sont exportés dans les océans par les rivières et que 84 % de ce flux sont sous forme de microplastiques. En Suisse, les modélisations de Kawecki et Nowack (2019) estiment que 15,1 g/hab/an de plastiques sont émis dans l’eau douce et que 88 % de cette émission sont sous forme de macroplastiques. Peu de données quantifiées existent sur les flux de macro- et microplastiques issus des milieux urbains pour confirmer/infirmer ces estimations. De même, peu d’études illustrent la dynamique de transfert de cette pollution le long du continuum homme-terre-mer. Enfin, les microplastiques peuvent être de sources primaire ou secondaire, lié à la dégradation des macroplastiques, et cette seconde source est rarement prise en compte dans les modèles. Les projets de recherche portés par le laboratoire Eau et Environnement et menés en collaboration avec le laboratoire Eau Environnement et Systèmes Urbains tendent donc à apporter des éléments de réponse sur les flux de micro- et macroplastiques depuis les milieux urbains jusqu’au milieu océanique. Les résultats apportent une vision précise des sources, des flux et de la trajectoire des macroplastiques. De fortes proportions se retrouvent abandonnées sur les surfaces urbaines même si celles-ci restent faibles vis-à-vis des quantités consommées dans ces espaces. Une rétention importante de macroplastiques est observée dans les zones végétalisées et dans les infrastructures des réseaux pluviaux (avaloirs à grille, bassins de rétention, …). Aux exutoires pluviaux, des flux compris entre 2 et 10 g/hab/an sont ainsi quantifiés et tendent à confirmer les estimations de Kawecki et Nowack (2019). Leur transport n’est toutefois pas linéaire dans les réseaux hydrologiques de surface. Dans les estuaires macrotidaux de la Seine et de la Loire, les zones intertidales et végétalisées créent également d’importantes zones d’accumulation. Les taux de fuite de macroplastiques sont donc faibles et peu atteignent l’océan. Concernant les microplastiques, les résultats mettent en évidence leur présence dans divers environnements (ruisseau urbain, sédiments de Loire, berges de Seine, …) mais il est difficile d’établir des bilans de flux. Il est toutefois démontré que des apports considérables de microplastiques secondaires sont issus de la fragmentation des macroplastiques. A l’échelle d’un ruisseau urbain, leurs concentrations suivent la dynamique hydrosédimentaire mais leur dynamique de transfert à grande échelle est difficile à établir. Une meilleure quantification de la pollution plastique des milieux continentaux aux milieux océaniques nécessite donc une prise en compte des sources secondaires de microplastiques et des processus de transfert de cette pollution.